Face à l’urgence climatique, pourquoi les bétons bas carbone sont-ils réputés encore peu utilisés dans les Travaux Publics ? En premier lieu, les liants couramment utilisés dans les Travaux Publics, appelés CEM III (ciments riches en laitiers de haut-fourneau), sont déjà sensiblement (-35 à -50%) moins carbonés que le liant historique dit CEM-I et répondent déjà à l’appellation bas carbone même si leur disponibilité est de plus en plus limitée.
Il existe de nouvelles possibilités de formulation de béton bas carbone, mais la durée de vie très longue des infrastructures construites impose des processus lourds de validation de ces nouveaux bétons, au travers de la normalisation de type AFNOR.
Découvrez comment la FNTP travaille à rendre ces nouveaux bétons bas carbone couramment utilisables dans les ouvrages à construire.
Les engagements pris par la FNTP pour la décarbonation des activités de la construction TP sont de 40% de réduction à l’horizon 2030 comparé à 1990. Or, les 2/3 des émissions de Gaz à Effet de Serre des chantiers TP sont liés aux matériaux utilisés et parmi eux le béton est l’un des plus gros émetteurs.
Si depuis plusieurs années, on parle souvent des bétons et des ciments bas-carbone, ils apparaissent à ce jour peu utilisés dans le domaine de la construction, alors ces ciments bas carbone de première génération (CEM-III) sont d’usage fréquent depuis des dizaines d’années sur les ouvrages de Travaux Publics. Par exemple, les premiers chantiers du métro parisien ont été faits avec des ciments riches en laitier de haut fourneau.
Pourquoi ?
Les ouvrages réalisés par les entreprises des Travaux Publics ont une durée de vie qui peut se compter en centaines d’années et les garanties demandées par les maîtres d’ouvrage se comptent bien souvent en dizaines d’années. Pour assurer les travaux qu’elles exécutent, et ainsi satisfaire aux garanties exigées par les maîtres d’ouvrage, les entreprises font appel à des sociétés d’assurance. Ces dernières se réfèrent systématiquement à des documents de référence, essentiellement des normes de type AFNOR françaises, européennes ou internationales. Pour rappel, ces normes sont issues d’un travail conjoint d’experts des différents acteurs, pour former un consensus.
Dans le cas des matériaux, elles ont été récemment révisées en s’appuyant des essais de durabilité (normalisés eux aussi) pour simuler ces dizaines d’années de durée de vie. Ce processus (dit méthode performantielle) est long, bien souvent plus de trois mois pour chaque chantier, et requiert des compétences pointues, pour assurer le sérieux et la fiabilité des travaux (ce délai fait que souvent la démarche est réservée aux chantiers de taille importante) Ensuite, les nouvelles méthodologies doivent être intégrées par les acteurs.
Les conséquences juridiques et financières pouvant être fortes, il est indispensable de prendre le temps nécessaire pour que les garanties données soient couvertes avec un niveau raisonnable de certitude.
La question est donc d’arriver à un compromis entre le haut niveau d‘urgence climatique, et les exigences légitimes de pérennité des travaux effectués. Les entreprises des Travaux Publics travaillent en continu avec les autres acteurs de la filière pour accélérer ces processus via une évolution de la normalisation.
Les entreprises de Travaux Publics utilisent en grande quantité des liants de type CEM III depuis bien longtemps, pour des raisons d’abord techniques liées aux performances (durabilité, faible exothermie). Ces liants sont déjà considérés comme bas-carbone, par comparaison au liant de référence au clinker CEMI, le plus carboné (entre 35 et 50% d’émissions carbone en moins selon les usages).
En complément de ces données assurantielles, des solutions de béton bas carbone et très bas carbone ont récemment été développés, pour des comportements (caractéristiques techniques) très proches des ciments dits classiques. Cependant, des solutions plus éloignées, incorporant constituants non traditionnels sont apparues, et peuvent présenter des comportements différents qui compliquent leur utilisation en bétons de structure. Les deux coexistent, et le choix entre les deux devra être fait avec soin, et après justification pour la seconde catégorie.
Dans les deux cas, les possibilités d’utilisation resteront conditionnées, comme dans le cas des CEM III, à l’atteinte des vitesses de durcissement souhaitées, la réduction du carbone étant classiquement obtenue par une réduction de la fraction clinker et donc de la réactivité du liant.
La FNTP travaille à rendre accessible ces outils majeurs de décarbonation à tous les acteurs de la profession.